La série SGS a fait ses débuts l’an dernier en abordant deux thèmes, l’un original, celui de la guerre d’Hiver en 39, avec SGS Winter War, l’autre classique, celui de la guerre du Désert en 41, avec SGS Afrika Korps. Ce système prometteur pour les wargamers devrait cette année se pencher sur un autre sujet intéressant, la campagne d’Afrique orientale qui eut lieu en 14-18. Voici un aperçu de ce que proposera le futur SGS Heia Safari.

Il est encore trop tôt pour vous présenter en détail le déroulé d’une partie, je ne vais ici vous montrer que le début d’un scénario. Néanmoins on retiendra que le jeu proposera tant une dimension militaire que des aspects économiques et politiques via son système de cartes évènements.

SGS, oui, mais qu’est-ce ?

Le système SGS (Strategy Game Studio) est dérivé de celui de Wars Across the World, en reprenant le principe mais en l’approfondissant à l’attention de ceux voulant un gameplay et des scénarios plus pointus. Il est conçu par Philippe Thibaut (Europa Universalis, les titres d’Ageod, etc.) qu’on ne présente plus et qui consacre ici une bonne partie de son talent et de son expérience à une nouvelle série de jeux schématiquement à l’échelle opérationnelle. Autrement dit Wars Across the World offrait un gameplay hybride plus orienté jeu de plateau, SGS offre un gameplay moins hybride, plus orienté wargame.

En conséquence les batailles, aspect primordial pour un wargame, sont ici simulées plus en détail. En effet, pour résumer, le jeu propose plus de paramètres à prendre en compte, particulièrement au niveau des unités et des combinaisons à effectuer entre elles pour obtenir le meilleur résultat possible, selon les situations. Cela tout en restant assez facile d’accès.

Pour vous donner une idée des différences, je tacherai de mieux en parler dans un futur article, voyez cet AAR sur le scénario Sicily 1943 dans Wars Across the World. Dans SGS, les unités ont plus de caractéristiques variées, par exemple elles peuvent avoir jusqu’à une dizaine de « points de vie », reflétant ainsi leur taille, leur équipement, etc, et surtout permettant des résultats plus fins. Typiquement, une bataille peut faire qu’une unité soit partiellement détruite, elle se repliera alors si possible et pourra selon les cas être renforcée dans les tours suivants, pour revenir au combat. Cela conjugué avec par exemple des terrains offrant de bonnes valeurs défensives, ou une fortification, ou encore certaines cartes spéciales, permet des résultats plus fins et réalistes. Schématiquement, le gameplay est moins binaire, on peut tabler sur des demis victoires, sur une attrition au fil des tours, etc. La prise de décision du joueur a dans SGS plus d’importance pour influer sur la guerre.

Le système actuel conserve son découpage par zones, c’est l’un des principaux et relatifs regrets que l’on peut avoir, mais par rapport à un maillage à base d’hexagones ce type de grille a il faut le reconnaître l’avantage de simplifier relativement, selon les cartes, les mouvements. Je dis relativement car la simplification d’une carte dépend en fait de sa taille, et donc du nombre de cases simulant les différentes zones. Les plateaux des jeux SGS sont plus grands et proposent un équilibre assez satisfaisant entre taille du plateau de jeu et détail du plateau de jeu. Et incidemment nombre d’unités en jeu et donc temps de jeu. Chacun appréciera selon ses attentes.

 

SGS Heia Safari - Menu
Menu principal du jeu.
SGS Heia Safari - Menu
Description générale de la campagne. Toutes les images de cette préview sont faites à partir d’une version en développement du jeu, elles ne montrent pas le résultat final.

En effet en ayant une grille plus légère, moins de cases où bouger donc, on perd certes en précision dans les mouvements, mais on gagne en rapidité de prise de décision. En adjoignant à ce système des unités légères de reconnaissance, des pions servant de leurres, du brouillard de guerre, des positions retranchées, ou encore des chefs d’unités, on obtient dans l’ensemble un bon nombre de variations tactiques et / ou stratégiques.

Zones ou hexagones, il faut choisir. C’est ici un choix de gameplay qu’il faut accepter. De même que celui des cartes évènements.

Les jeux à base de pioche de cartes sont devenus très fréquents. A nouveau le principe des cartes évènements a le mérite de permettre de représenter plus ludiquement des concepts divers et variés qui sinon demanderaient plus de règles à codifier par les concepteurs et à assimiler par les joueurs. L’inconvénient étant que le tirage de cartes étant relativement aléatoire, cela ajoute un flou au cours des évènements, et à la maîtrise que le joueur peut essayer d’en avoir. L’avantage étant que cela rend le déroulé d’une partie plus rapide, et dans certains cas offre plus d’imprévu et donc de rejouabilité.

C’est un autre choix plus ou moins discutable, mais pour simuler plus et mieux (qu’avec une pioche de cartes), il faudrait plus de temps aux concepteurs comme aux joueurs… Passons.

Précisons que dans SGS toutes les cartes ne sont pas aléatoires à 100%. Certaines doivent être obligatoirement jouées dans des conditions précises, simulant alors un moment historique majeur. Ou permettant de limiter certaines actions, quand par exemple une unité ne peut-être activée que si une carte précise est jouée. L’ensemble permet de maintenir un scénario dans un cadre relativement cohérent au regard de la situation qu’il simule.

Le système SGS est encore assez jeune, il évolue donc au fil des premiers titres, et des différentes situations à modéliser. Toutefois on notera qu’il offre potentiellement la même palette très diverse vue dans les scénarios de Wars Across the World, avec plus de nuances stratégiques proposées.

Si le jeu est jouable avec une IA, pratique pour découvrir les règles ou s’entraîner un peu, c’est évidemment en multijoueurs, ici en PBEM ou en Hotseat, qu’il prendra toute sa saveur. D’autant plus que les scénarios (souvent d’introduction) et les campagnes ne sont pas trop longs à jouer.

Les jeux SGS vont offrir au fil des volumes une gamme dans laquelle jouer, voire même créer, car le jeu dispose d’un éditeur de scénario assez élaboré, que des joueurs motivés peuvent éventuellement obtenir pour élaborer leurs propres jeux. Les sept premiers titres annoncés, dont deux sont déjà disponibles et dont Heia Safari est le troisième en chantier, reflète bien cela.

Le moteur permet de représenter, surtout à l’échelle disons opérationnelle, de nombreuses époques et situations. Pour terminer ce survol, voici donc un aperçu de l’affrontement entre les forces impériales allemandes, dirigées par l’audacieux von Lettow, et celles de l’Entente, durant la Grande Guerre.

SGS Heia Safari

Le jeu, dont le titre reprend celui d’un chant de marche des soldats de l’époque, simule ici quatre années de conflit au fil de 52 tours, chaque tour représentant donc un mois. La situation est historiquement donc dans le jeu très déséquilibrée, les Allemands étant sur la défensive, avec peu de troupes mais de bons chefs, tandis que les Alliés ont eux plus d’unités, mais des chefs de moindre qualité.

La carte comporte, sauf erreur de ma part, un peu moins de 400 régions. Cela inclue des zones navales (maritimes ou lacustres) et des zones hors-carte, représentant par exemple des bases de renfort ou de ravitaillement dans des pays voisins (Congo Belge, Rhodésie, Afrique du sud, Inde).

De plus un amusant mécanisme dit Index de tension, incite le joueur coté Entente à ne pas mobiliser trop d’unités, car historiquement celles-ci étaient requises sur le front européen. Différentes cartes feront monter ou descendre cet index.

Pour ne pas vous rédiger de longues explications, je vais dans cette première partie d’abord vous illustrer les grandes lignes de la situation de départ. De toutes manières, pour quiconque s’y connait en wargames, la logique est celle habituelle. Si vous connaissez Wars Across the World, idem, mais en plus fouillé.

Un exemple quand même d’un mécanisme pertinent, chaque zone a désormais une limite d’empilement. Chaque unité a elle une valeur d’empilement, on doit donc prendre cela en compte selon les types de terrain, les forces en présence et les mouvements souhaités. Il faut ainsi bien connaître les caractéristiques de carte et de ses unités. Surtout que de cela découle le ravitaillement, un facteur à ne pas négliger, dont l’effet est dans SGS moins immédiat, plus étalé sur plusieurs tours de jeu, que dans Wars Across the World. Cet aspect du ravitaillement peut être compensé par certaines cartes, ou par de souvent fragiles unités de logistique, ici représentées par des porteurs accompagnant l’infanterie. Ces unités spéciales apportant aussi un léger bonus quand elles sont présentes lors d’un combat.

Le cumul, la combinaison de différents bonus peut alors soit compenser des malus inhérents par exemple au terrain, soit nettement augmenter les chances de réussite de vos attaques. Les batailles se déroulant en plusieurs rounds, un à trois en général, au fil desquels le moral de chaque camp s’effrite, on voit assez vite en jeu comment optimiser ses coups. Quitte à vite se replier au final pour plutôt harceler un ennemi plus nombreux, et réussir à lui causer quelques pertes qui le pénaliseront, sans trop en subir de son coté, évidemment. C’est particulièrement le défi qu’offrira SGS Heia Safari. Et qui fut celui que réussit pendant plusieurs années le général von Lettow.

Allez, trêve de paroles, en route vers l’Afrique tropicale de 1914, du coté de Zanzibar, du Tanganyka et du Kilimandjaro !

Situation en début de partie coté Allemand

SGS Heia Safari
1/ Récapitulatif initial de la situation. Un tour de jeu se découpe en une douzaine de phases se jouant strictement l’une après l’autre (ex : Renforts, Ravitaillement, Mouvements terrestres, etc.).
SGS Heia Safari
Vue de la carte, avec le filtre montrant les régions dans chaque camp. En rouge ce sont les territoires contrôlées par les factions de l’Entente. L’Allemand est encerclé.
SGS Heia Safari
Quelques unités navales permettent d’agir sur les grands lacs, surtout pour déplacer des troupes.
Les cartes auréolées en mauve doivent obligatoirement être jouées dans la phase de jeu en cours. Ici un évènement historique.
Je pioche une carte que je pourrais jouer, ou sinon défausser peut-être, par la suite.
L’Allemand a un vaste territoire à défendre avec peu d’unités. Les chefs vont avoir d’autant plus d’importance.
L’Allemand a de nombreux pions leurres, qui vont aider à semer le doute chez l’adversaire.
Un évènement automatique dans la phase de Renforts. 2 compagnies sont formées, l’une placée automatiquement, l’autre au choix par le joueur.
Les régions où l’on peut placer une compagnie en renfort sont en surbrillance en jaune. Je n’ai pas zoomé pour vous montrer les choix possibles.
Dans le jeu différents utiles écrans récapitulent ce qui est arrivé. On peut les masquer, pour examiner alors la carte, ou passer à la phase suivante.
Au début de chaque tour un écran résume ce qu’il s’est passé pour les deux camps. Ici on voit le résumé au début du premier tour de l’Entente, avec donc juste le peu d’actions de l’Allemand au premier tour.
Autre exemple d’évènement plus ou moins automatique, ici dans la phase de Mouvements terrestres. Toutes les unités perdent 2 pts de mouvement, et un nombre aléatoire de piles sont immobilisées.

 

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