Pour accompagner la sortie le week-end dernier de Rise and Fall, la première extension de Civilization VI, voici un récit de partie dans lequel je vais vous présenter d’une part les intéressantes nouveautés, d’autre part le déroulement relativement détaillé de ce qui devrait être une belle partie. En effet, de base Civilization VI est déjà un très bon jeu, avec cette extension certains de ses défauts ennuyants sont gommés et, cerise sur le gameplay, le jeu gagne en profondeur sans pour autant trop se perdre en complexité.
Du moins dans la plupart des cas, car évidemment avec un tel bac à sable vidéoludique, on peut très bien arriver à des situations décevantes. Tout dépend des choix que chacun effectue, fonction du tirage relativement aléatoire de la situation de départ et des variations dans les réactions de l’intelligence artificielle.
Là où le jeu excelle, ce n’est bien entendu pas en terme d’intelligence artificielle des adversaires, ce n’est d’ailleurs pas le but du jeu ni l’objectif des développeurs, mais bien dans le nombre de choix globalement cohérents qui sont proposés au joueur. Au delà de l’histoire qui sert de toile de fond pour offrir un bel enrobage, dans Civilization ce sont les problèmes à résoudre et donc les choix à effectuer qui font toute la saveur du jeu.
Quel type de victoire choisir ? Scientifique, militaire, culturelle, religieuse, ou simplement au score final ? Dans quelle direction faut-il explorer ? Mieux vaut-il face à tel voisin belliqueux opter pour la défensive, et laisser un autre voisin accomplir la sale besogne ? Ou au contraire, frapper le premier, avant de perdre l’initiative ? J’en passe, et bien d’autres, car si les questions à se poser dans Civilization sont nombreuses, heureusement le jeu amène ces problèmes de belle manière, et en réfléchissant un peu on trouve facilement, si ce n’est des solutions, du moins des pistes à explorer.
Et bien, bonne nouvelle, Rise and Fall a donc rajouté plusieurs couches de prises de décision, la plus délicieuse d’entre elles étant le système de Loyauté. Système qui influe nettement d’une part sur le comportement de l’IA, qui par exemple, et comme on le voyait trop dans le jeu de base, venait souvent s’installer impunément aux portes du territoire du joueur. Et système qui d’autre part sans empêcher de guerroyer à tout va si l’on veut, force le joueur à mieux réfléchir aux cibles de ses conquêtes, ainsi qu’aux conséquences. La première d’entre elles étant que les villes conquises peuvent désormais reprendre en quelque sorte elles-mêmes, par la force, leur liberté. Cela passé un délai variable fonction de différents facteurs qui se résument au cumul des influences extérieures des villes voisines. Qu’il s’agisse des vôtres, de celles de votre ennemi avec qui vous êtes en guerre, ou même de celles des autres civs.
Ce qui inévitablement amène des cascades d’événements, parfois un peu contrariant sur le moment quand on est surpris, car justement les plans du joueur ne vont pas se dérouler comme prévu, mais qui en fait s’avèrent très amusants. Une ville tout juste prise à votre ennemi pouvant tout à fait basculer chez un autre voisin, d’autant plus si celui-ci l’avait justement perdue au profit de celui avec qui vous êtes en guerre. Dit ainsi cela peut sembler confus. En jeu, cela devient vite très clair, et plutôt rigolo.
Précisons aussi ici pour ceux qui hésiteraient à passer ou non à cette extension que si je ne l’ai pas encore assez essayé pour en faire un “test”, mes premières impressions sont très positives. Il y a encore des défauts, ou disons des carences, évidemment, dans le gameplay, il y a des petits bugs pour la plupart mineurs, mais je suis aussi tombé sur un problème forçant parfois, pas systématiquement, à redémarrer l’ordinateur pour lancer une partie. Ce qui n’arrivait pas avant la récente mise à jour du jeu, mais qui n’est pas non plus, dans mon cas du moins, un facteur empêchant de jouer avec Rise and Fall. Bref, en résumé, cette nouvelle extension va probablement très vite s’imposer comme une évolution quasi indispensable du jeu, tout simplement car globalement elle le rend plus “fun”.
Pour cette partie j’ai choisi la France qui sous la tutelle de Catherine de Médicis est donc une civ plutôt intéressante vers les milieux de partie, entre les périodes médiévales et industrielles. Ce qui ne signifie pas que l’on ne puisse pas bien s’amuser avec en début de partie, mais qu’évidemment face à d’autres civs ayant elles des avantages durant l’Antiquité, il faut faire l’impasse sur certains choix. Typiquement la construction de Merveilles et le recrutement de personnages illustres.
Cela varie évidemment fonction du niveau de difficulté choisi. Ici je vais jouer au niveau Empereur. Soit au niveau 6 sur 8, ce qui pour un joueur expérimenté est un bon choix pour que le jeu reste amusant sans être ni trop facile, ni trop difficile.
Pour corser quand même un peu plus la difficulté, sans donner trop d’avantages en termes de points à l’IA, ce qui force à plus encore millimétrer ses coups et diminue le nombre de choix “amusants”, sans quoi les autres civs prennent une avance frustrante voire parfois impossible à rattraper, pour pimenter donc le jeu mais aussi plus varier le cours des événements, je vais tout simplement jouer cette partie sur une carte Immense, avec le maximum possible de civilisations et de cité-états, respectivement 20 et 24.
Ce qui nous donne quand même une carte totalisant quasi 7 000 hexagones de terrain (106 x 66) où vont s’affronter 44 acteurs, sans compter les barbares qui surgissent régulièrement un peu aux quatre coins.
La carte sera de type Continents, c’est à dire deux très grandes masses terrestres et quelques îles majeures ci et là. Tous les autres paramètres sont ceux standards, sauf l’espace alloué aux mers, afin de laisser quand même un peu plus de place sur les terres à tout ce beau monde.
Notons au passage qu’il est dommage que Civilization VI ait diminué la taille maximum des cartes. Dans Civilization V une carte Immense faisait a priori 128 x 80, soit un peu plus de 10 000 hexagones. Pour un nombre d’acteurs principaux similaires (22 civs mais par contre 41 cité-états). Dans Civ VI, sauf à utiliser un mod, on a donc un terrain de jeu plus petit. Par contre on a, d’autant plus avec Rise and Fall maintenant, plus de mécanismes interagissant entre eux. Ce qui nécessite plus de puissance de calcul, le bridage des cartes dans Civ VI permettant donc que celles-ci restent à peu près bien jouables sur la majeure partie des ordinateurs “standards” aujourd’hui.
En poussant les réglages à fond, en début de partie on ne s’en rend pas bien compte évidemment, mais dès qu’on arrive vers l’ère industrielle, on sent qu’entre chaque tour, ou lors de certains actions du joueur, l’ordinateur est bien plus sollicité, et chaque tour de jeu devient plus laborieux à jouer. Certes cela dépend beaucoup du matériel de chacun, mais globalement c’est ce que l’on constatera.
Ajoutons enfin que lors du lancement d’une partie, surtout si celle-ci va être longue, et un peu compliquée, il ne faut pas hésiter à recommencer immédiatement si on n’obtient pas une bonne position de départ. En effet si Civ VI optimise plus la répartition initiale des ressources immédiatement à portée du joueur, d’une carte à l’autre cela varie. C’est particulièrement vrai si l’on veut jouer la course à la construction de Merveilles, à haut niveau de difficulté, l’IA ayant au début trop d’avantages pour cela.
Ici j’ai simplement retiré la carte une fois, et ai obtenu un placement initial qui semble intéressant. Particulièrement pour avoir de bonnes sources de nourriture, un des facteurs clés du jeu pour développer sa population. L’autre facteur majeur étant la production, qui ici devrait s’avérer suffisante pour construire assez rapidement les infrastructures et bâtiments essentiels.
Passons toutes ces considérations, et entrons dans le vif du sujet. Paris est fondée dès le premier tour et les guerriers partis explorer à l’ouest découvrent de vastes champs de blés. Un très bon point pour garantir à l’avenir une forte population. D’autant plus que sur la côte il y a du poisson, mais il y a aussi des récifs, a priori un nouveau type de terrain bonus venant de plus agréablement varier le paysage. Et non loin on trouve aussi du riz.
Les bovins dans les prairies à l’est, et les moutons dans les collines au sud viendront eux contribuer tant à l’alimentation qu’à la production. Une future mine de jade et une plantation de tabac viendront pour leur part égayer le quotidien des parisiens.
Coté recherche scientifique, je fais le pari de commencer par l’astrologie. Non pas pour construire Stonehenge, une Merveille qui nécessite des carrières de pierre. mais pour vite développer une religion. En effet la forêt nichée au creux des montagnes à l’ouest ferait un très bon site pour un lieu saint, qui aurait là un bonus de +3 (points de religion par tour). Seul bémol, il va falloir faire vite car l’IA n’hésite pas à développer elle aussi des religions, et il n’y en a que 7 différentes possibles dans cette partie.
Jouer avec la religion dans Civ VI est complètement optionnel. L’avantage étant que cela apporte de nombreux bonus variés, et que cela ajoute une couche amusante d’interactions, à savoir convertir ses voisins, en plus d’être une des conditions de victoire du jeu.
Coté culturel, au début il n’y a pas la choix, il faut attendre d’avoir découvert le Code des lois. Coté militaire, j’entame tout de suite la formation d’une unité d’éclaireurs, avec lesquels j’espère trouver rapidement des voisins, voire des bonus aléatoires avec les petits villages que l’on trouve parfois, si l’on a de la chance, vu que l’IA les prend aussi facilement.
Mes guerriers ayant rapidement croisé un éclaireur barbare, ils ont poursuivi leur exploration au sud-ouest. Ils sont vite tombé sur un camp de barbares situé dans aux abords d’une autre région riche en blé, et dans le voisinage du peuple de Montezuma. Je me retrouve donc avec l’Aztec comme voisin, ce qui n’est pas forcément une bonne nouvelle, cette civ ayant plutôt tendance à être agressive. Au moins les barbares de ce coté ne vont pas faire long feu devant les guerriers aztecs, et ne remonteront probablement pas de l’autre coté des montagnes. Celles-ci protégeant d’ailleurs en fait assez bien les flancs ouest et est de Paris.
Au tour 10 mes guerriers sont partis au sud de Paris et en arrivant aux bords de ce qui semble un grand désert, ils vont rencontrer un émissaire de Lautaro, jeune chef de la tribu des Mapuches, qui s’avère donc être installée non loin, plus au sud de Paris, derrière une autre petite chaîne de montagnes. Mes guerriers ont eu la chance de trouver un village aux abords d’une oasis, village dont les sages ont révélé aux parisiens le secret de … la navigation ! Il faut croire que cette petite tribu vivait avant en bord de mer, car apprendre à naviguer en plein désert, cela relève du miracle.
Ou alors cela serait un signe des dieux ? Les guerriers français sont très perplexes, ils en référeront à la reine en rentrant, mais d’abord ils vont devoir continuer d’explorer à l’est. Du coté de Paris, les éclaireurs sont eux partis au nord-est et, après avoir localisé un autre filon de jade, sont tombés nez à nez avec un autre éclaireur barbare. Ce qui n’est pas bon signe du tout, d’autant plus que cet éclaireur a très vite avancé jusqu’aux frontières parisiennes.
Si il n’y a pas d’autres voisins au nord-est, qui semble donc être une zone côtière, il va falloir se charger nous-même de cette future menace barbare. Ce que nous verrons prochainement dans le second chapitre de cet AAR, où les choses vont devenir très vite agitées.
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