Disponible depuis peu, Together for Victory est le premier DLC majeur de Hearts of Iron IV. Accompagné du patch 1.3, il est surtout centré sur le monde dépendant de la couronne britannique. En effet, dès la fin du XIXe siècle, certaines colonies acquirent une autonomie qui devint de plus en plus importante avec le temps : Londres voulait éviter de revivre une nouvelle guerre d’indépendance américaine. On parle là du Canada, de la Nouvelle-Zélande, de l’Afrique du sud et de l’Australie. A cela s’ajoute l’Inde, colonie un peu particulière (avec un vice-roi), engagée sur la voie vers l’indépendance, et elle aussi revisitée par l’extension. Voyons donc de quoi il s’agit.
Dominions et colonies
C’est le cœur de l’extension : une refonte totale des dominions et de certaines colonies britanniques. Ainsi, les pays cités dans l’introduction ont désormais tous des arbres de focus personnalisés et qui permettent de préparer ces États à la guerre de manière bien moins impersonnelle qu’avant.
On y retrouve certaines politiques d’industrialisation, mais aussi des conflits qui les ont traversés durant cette époque. Par exemple ce refus partiel de la conscription au Québec ou le mouvement de Gandhi en Inde. Au joueur de choisir entre plusieurs solutions pour résoudre ces tensions majeures.
Ainsi, les parties deviennent bien plus plaisantes qu’avant et les plus puissants de ces États offrent un plaisir de jeu réel, invitant à sortir des grandes puissances que l’on joue tout le temps. Des pistes alternatives sont même envisagées par les arbres : libre à vous de vous détacher de la couronne britannique et même de rejoindre le Komintern ou l’Axe !
Cela sera sans doute difficile à jouer pour certains pays du fait de leur position géographique, mais offre une bonne rejouabilité et permet d’envisager d’autres stratégies. On imagine déjà une Inde ou une Australie alliée au Japon et conquérant l’espace asiatique… Là où un Canada communiste offre a priori moins de possibilités (mais sait-on jamais !) Pas très tenable historiquement, mais le joueur fait encore ce qu’il veut et en début de partie il est possible de cocher une case pour que les choix de l’IA soient conformes à l’histoire. Donc chacun y trouvera son compte.
Reste que ces puissances sont toujours des possessions britanniques et le DLC introduit plusieurs statuts : satellite (deux niveaux), colonie et dominion, dernière étape avant l’indépendance pleine et entière. Les autres statuts sont plus ou moins contraignants et les pays concernés ne peuvent faire totalement ce qu’ils veulent. Par exemple les colonies et dominions ne peuvent choisir leur politique de conscription, la métropole colonisatrice a des avantages pour le commerce etc.
On peut progressivement accéder à l’indépendance en gagnant des points d’autonomie, de très nombreuses façons : participer activement à la guerre aux côtés de sa métropole, l’aider en envoyant du matériel, par le biais des arbres de focus, des évènements et ainsi de suite.
Cela illustre l’accès progressif de ces pays à la liberté et c’est notamment le cas de l’Inde qui l’acquit après la Seconde Guerre mondiale, en partie grâce à sa participation plus qu’active aux côtés des Alliés. Les autres avaient déjà gagné beaucoup d’autonomie après leur implication importante en 1914-1918, et de nouveaux statuts entre les deux guerres.
Notons que ce système de contrôle concerne aussi d’autres États comme les Pays-Bas et leur colonie des Indes Néerlandaises, ou encore le Japon qui gouverne la Mandchourie par le biais de l’État fantoche du Mandchoukouo, réintroduit avec le patch 1.3 (voir plus bas). Cela rappelle évidemment Victoria 2 et Europa Universalis IV où le contrôle sur les espaces colonisés n’est pas toujours complet. Verra-t-on cela s’étendre à d’autres régions à terme (mandats français et britanniques de la SDN en Afrique et Asie…) ?
Les pays cités au début peuvent aussi partager leurs découvertes technologiques grâce à un nouveau système franchement utile. Dès qu’elles sont découvertes par un État du Commonwealth jouable, les autres bénéficient de bonus pour leur recherche. C’est très bien, surtout lorsque ses équipes de recherche sont en nombre limité comme c’est le cas en début de partie.
Notons aussi de nouveaux modèles graphiques pour lesdits pays, plutôt bien réalisés. Certes, je le dis à chaque fois, on zoome tout de même assez rarement jusqu’à un niveau qui permet d’en profiter, mais c’est toujours appréciable.
Dernier point, sur l’expérience de jeu en elle-même. Après quelque temps, Paradox a annoncé1 que les pays concernés les plus joués de Together for Victory étaient sans surprise le Canada et l’Inde. En effet, même avec les ajouts de l’extension, les autres restent des puissances moyennes avec peu de ressources et de moyens. Il va être difficile de créer de fortes armées et impressionnantes flottes aériennes ou navales avec des entités comme l’Australie et la Nouvelle-Zélande, ce qui limite la portée de l’extension.
De plus, je trouve qu’il reste un problème de rééquilibrage à régler. Jouant avec l’Inde, et l’engageant sur la voie de l’indépendance, tout en restant allié avec les Britanniques, j’ai eu le très grand déplaisir de voir mes effectifs fondre littéralement, perdant 600.000 hommes en quelques mois seulement en luttant contre les Japonais en Chine… Japonais qui enregistraient des pertes six fois moindres (voir capture d’écran plus bas).
Cela semble assez peu réaliste (même au vu des pertes historiques totales de la guerre) et surtout a ruiné la partie : étant encore, en 1941, sous dépendance britannique, malgré un passage du statut de colonie à celui de dominion, je ne pouvais décider de ma politique de conscription et donc de ma main d’œuvre disponible ! Il y a sans doute quelque chose à revoir, même si j’ai aussi pu jouer de malchance. Notons toutefois un problème assez similaire avec le Canada, à la démographie bien plus limitée.
Ces deux points nuançant le portrait général, les pays du Commonwealth sont désormais réellement jouables et peuvent apporter un vrai concours à la guerre contre l’Axe, à moins que vous ne décidiez autrement. A côté de cela, des ajouts plus généraux existent, voyons-les à présent.
Ajouts généraux
Il faut bien l’avouer, ils ne sont pas inintéressants, loin de là, mais restent assez peu nombreux par rapport au cœur de cible de l’extension. J’expédie assez rapidement de nouveaux thèmes musicaux du compositeur attitré du studio, Andreas Waldetoft. Comme ses autres productions, je les trouve adaptés au jeu et ils remplissent parfaitement leur rôle. Notons la capacité introduite par le patch 1.3 de passer ou rejouer, avec un onglet intégré directement au jeu, les morceaux. A chacun de juger et on peut toujours couper la musique pour passer la sienne…
Reste donc, ceci dit, une refonte du système de Prêt-Bail et un nouvel ordre offensif : spearhead, soit « fer de lance ». Il permet de préciser ses attaques sur des points précis du front à percer, et a notamment été pensé pour les forces blindées et motorisées. C’est une manière de retrouver un meilleur contrôle sur ses troupes et les actions qu’on veut leur faire entreprendre, comme réaliser de grands encerclements.
Jusque-là le système de combat ne faisait pas l’unanimité, ni la chaîne de commandement, car le joueur, s’il économise beaucoup de temps avec moins de micro-gestion, perd aussi en finesse sur la manière de conduire la guerre. Ce genre d’ordre permet d’affiner ses choix, de recréer des armées blindées plus facilement qu’avant, mais le système général ne peut sans doute pas être refondu complètement, et ses détracteurs devront encore faire avec.
Quant au Prêt-Bail, Lend-Lease en anglais, il est dorénavant bien plus efficace qu’avant. Souvenez-vous : on ne savait jusqu’alors pas quels étaient les besoins des autres pays ni ceux-ci n’étaient vraiment au courant des nôtres, du moins dans les parties solo. Aussi était-il compliqué d’envoyer du matériel, action qui se réalisait à l’aveuglette : qu’envoyer ? A qui ? En quelle quantité ?
Désormais l’ordre a changé et on peut requérir un type précis de matériel ou recevoir des demandes ciblées de la part des autres. C’est une très grande avancée, et qui est également liée aux dominions et colonies, puisqu’aider son colonisateur fait aussi gagner des points d’autonomie. Or, on sait historiquement que beaucoup de matériels utilisés par l’armée britannique furent en effet produits au Canada ou en Inde, c’est donc très appréciable. Songeons aussi à l’aide américaine en direction de l’URSS.
Pourtant ce sont là les deux plus importants ajouts généraux de l’extension, les autres concernant surtout le Commonwealth. Si l’on ne compte pas jouer ces pays, l’addition est assez salée car la moisson paraît maigre pour le reste. Terminons toutefois par le patch.
Le patch 1.3 « Torch »
Together for Victory s’accompagne donc d’un patch 1.3 conséquent et nommé « Torch », du nom du débarquement allié en Afrique du Nord fin 1942. Il a fait l’objet d’un hotfix 1.3.1 ce 21 décembre. Comme d’habitude, il corrige des bugs et rééquilibre de nombreux points (voir ce changelog), ainsi qu’ajoute des contenus liés à l’extension, ce qui rend toujours la frontière entre les deux floue et empêche d’en réellement profiter si on ne la possède pas.
On voit ainsi le retour du Mandchoukouo que j’évoquais plus haut. Il s’agit d’un État à la solde du Japon qui plaça à sa tête Pu Yi, le dernier empereur de Chine détrôné en 1911. Il vient compléter la refonte de cette région du globe, les Japonais ayant souvent procédé ainsi pour s’assurer du contrôle des régions envahies en Chine et ailleurs.
Le jeu modélise d’ailleurs également le Mengkukuo, structure fantoche formée dans le nord du pays dans un but identique. L’absence du premier était regrettable et voilà qui est réparé.
A côté de cela, on trouve bon nombre de raccourcis et d’alertes franchement utiles. Si l’on ne peut tout citer, je retiendrai :
- Une alerte lorsque l’on continue à produire de l’équipement dépassé par les nouvelles technologies. Cela permet de ne pas oublier de changer ses lignes de production.
- Le contrôle sur la musique cité précédemment.
- Un écran pour voir où l’on est dans la course aux succès, utile si l’on cherche à les obtenir.
Notons aussi de nouveaux généraux, des nouveaux modèles d’unités pour l’Europe de l’est et les satellites de l’Allemagne (et pas payants cette fois !), de nouveaux succès.
Enfin, une précision dans l’ordre de garnison qui est plus que bienvenue. Avant, les troupes se répartissaient assez mal dans les zones à défendre, et c’était un vrai cauchemar en cas d’attaque ennemie, notamment de débarquement dans les régions côtières. Désormais, on peut leur demander de garder uniquement certains points particuliers si on le souhaite : les forts, les bases navales, les côtes… C’était nécessaire pour éviter de perdre du temps à sans cesse les repositionner.
Bref, un contenu gratuit conséquent et pour une grande partie directement utilisable dans les parties, permettant par là même un plus grand confort de jeu. On ne peut que souhaiter de nouvelles mises à jour aussi importantes dans l’avenir.
A lire en complément au sujet de la présence italienne dans la corne africaine la série d’articles suivante : Les italiens et l’Éthiopie, d’Adoua à la 2nde Guerre mondiale.