Nous avons déjà présenté Napoleon in Egypt qui est actuellement disponible en précommande chez GMT. Voici donc une présentation plus approfondie du système de ce jeu dirigé par les cartes (card driven game) qui couvre la campagne d’Égypte, expédition militaire menée par le général Bonaparte et ses successeurs de 1798 à 1801.
Notons qu’un livret de règle en VF sera disponible dès la sortie du jeu. Cet article est le premier d’une série où nous allons expliquer les différentes mécaniques du jeu en jouant le premier Tour du scénario de campagne. Pour rappel, tous les visuels présentés ci-après sont ceux du proto et ne reflètent en rien les superbes graphismes qui seront proposés par les artistes de GMT.
1er juillet 1798. 35 000 soldats français débarquent à Alexandrie. Quelle est la prochaine étape ?
Chaque tour, le joueur français est le premier à jouer. Ceci est particulièrement important lors de ce tout premier Tour, car il a la possibilité de frapper fort d’office en utilisant la supériorité numérique écrasante de ses forces fraîchement débarquées. L’ouverture la plus classique consiste à tout simplement suivre la voie tracée par le général Bonaparte il y a de cela 224 ans en cherchant à provoquer la Bataille des Pyramides.
Quatre espaces séparant Alexandrie du Caire (où se trouve l’armée mamelouke commandée par Mourad Bey), le joueur français doit jouer une carte valant au moins 4 Points d’Action (PA) pour y parvenir dès cette première activation, mais il a une meilleure idée…
En effet un itinéraire alternatif vers le Caire est possible, par l’ouest. Cependant ce chemin traverse deux Espaces Inhospitaliers (matérialisés par deux triangles bruns). Non seulement il en coûte 2PA pour y entrer au lieu de 1, mais y pénétrer déclenche également un jet d’Attrition, qui a une chance d’éliminer certaines des Unités en mouvement. Plus il y a d’Unités dans la formation en mouvement, plus le jet d’attrition a des chances d’être punitif. Heureusement, le joueur français joue la carte Across the Desert (À Travers le Désert) qui annule ces deux problèmes et qui lui permet de reproduire l’itinéraire difficile, mais inattendu par les mameloukes, que Napoléon a historiquement emprunté pour atteindre Le Caire.
Le leadership est d’une importance capitale dans Napoleon in Egypt. Afin de déplacer plusieurs Unités, un Chef doit être présent, sinon 1PA ne permet de déplacer qu’une seule Unité et d’un seul espace. La Valeur Stratégique d’un Chef (coin supérieur droit du pion de Chef, chiffre noir) correspond au nombre d’Unités que ce chef peut déplacer simultanément avec un seul PA. De plus deux Chefs (mais pas plus) se déplaçant ensemble peuvent combiner leurs Valeurs Stratégiques. Ainsi, le joueur français souhaitant quitter Alexandrie avec autant d’unités que possible, il utilise donc Napoléon et Desaix pour amener 22 Réguliers français jusqu’au Caire à travers le désert (grâce à la carte À Travers le Désert dont l’événement lui attribue 5PA et permet d’ignorer les effets des deux Espaces Inhospitaliers traversés. Cela laisse 8 Réguliers français avec Kléber à Alexandrie, une belle force en réserve qui pourra servir à capturer les villes mineures autour du Caire.
Le joueur allié (nous prenons ce raccourci afin de nommer l’alliance Mameloukes-Ottomans-Britanniques) sait que Mourad Bey et ses 10 unités de cavalerie mameloukes au Caire ne feront pas le poids en bataille rangée contre l’ogre français. Il tente donc en réaction au mouvement français d’éviter la bataille avec Mourad Bey et six Unités vers l’espace libre au sud du Caire. Il laisse quatre Unités derrière les remparts du Caire (le maximum que puisse contenir une ville intra-muros), histoire de ne pas offrir une ville ouverte et obliger les Français à enclencher un siège difficile. Dans Napoleon in Egypt, les tentatives d’évitement de Bataille (mais aussi d’Interception) sont résolues par un jet de 2D6 qui sera modifié par la Valeur Tactique d’un Chef présent pour chaque camp (coin supérieur gauche du pion de Chef, chiffre rouge pour les Généraux, bleu pour les Amiraux,) et la présence de cavalerie.
Le joueur allié va donc lancer 2D6 et devra obtenir un résultat de 9+ afin de réussir à éviter la bataille. Les modificateurs pris en compte sont +2 pour la Valeur Tactique de Mourad Bey, +1 puisque sa Formation est composée exclusivement d’Unités de cavalerie mais -3 pour la Valeur Tactique de Napoléon (il est difficile d’échapper à Bonaparte !). Il obtient un 8 et échoue… La Bataille des Pyramides va donc avoir lieu et elle sera sanglante !
Même dans une bataille rangée comme celle qui va se dérouler, toutes les unités ne sont pas forcément impliquées dans le combat. Les joueurs, l’Attaquant en premier, doivent indiquer combien d’Unités participent effectivement à la bataille, sachant qu’un seul Chef et un nombre d’Unités équivalent à sa Valeur Stratégique pourront participer. Ici le joueur français envoie évidemment Napoléon en première ligne avec 12 Réguliers français (thématiquement, Desaix et le reste des troupes françaises sont en réserve). Le joueur allié peut et utilisera tout ce qu’il a sous la main (Mourad Bey a une valeur Stratégique de 12) !
Avant d’enclencher la bataille, les joueurs peuvent jouer des Événements de Réaction. L’attaquant joue autant de cartes qu’il peut / veut, puis le défenseur fait de même.
Le joueur français déclare utiliser sa Carte Nation pour son Événement de Réaction qui lui permet de bénéficier du résultat Carré d’Infanterie sur les Dés de Combat Élite (infligeant ainsi une perte supplémentaire pour chacun de ces résultats). La Carte Nation est une carte puissante et précieuse, il faut savoir l’utiliser au bon moment. Ici, au début de la partie, le joueur français veut prendre l’initiative et souhaite frapper durement le joueur allié. Il retourne donc sa Carte Nation sur sa face non disponible ; elle ne sera retournée sur sa face disponible qu’à la fin du Tour.
Le joueur allié veut éviter que Mourad Bey soit capturé, ce qui se produira si toutes les unités qui l’accompagnent sont anéanties. Il joue donc l’Événement de Réaction Feinte, ce qui lui permettra de lancer ses dés de bataille et d’appliquer les résultats en premier (normalement les dés de bataille sont lancés simultanément et leurs résultats sont appliqués également simultanément).
Le cube noir sous la valeur 1PA de la carte Feinte signifie que le joueur allié gagne immédiatement un point d’espionnage (PE, représenté par des cubes noirs dans le jeu) lorsque la carte est jouée. Ce symbole PE est présent sur chaque carte 1PA dans Napoleon in Egypt. Un petit lot de consolation pour une carte à faible PA !
Les deux camps calculent maintenant leur Pool de Dés de Combat. Chaque unité impliquée apporte un Dé de Combat de la couleur indiquée sur son pion (appelée Qualité de Combat). La Qualité de Combat peut être Élite, Vétéran, Moyen ou Médiocre. Le nombre de faces « perte » sur chaque dé varie en conséquence. Les autres faces sont vierges, mais certains dés présentent également une face « carré » qui peut être considérée comme un succès lorsque l’Événement de Réaction correspondant est joué, comme dans le cas de la Carte Nation française ci-dessus.
Avec Napoléon au commandement, les Français peuvent impliquer 12 Réguliers français au combat (soit la Valeur Stratégique de Napoléon). À ces 12 Dés de Combat Élite s’ajoute la Valeur Tactique de Napoléon (3), soit un total de 15 Dés de Combat Élite (précisons que si la Formation qui attaque est composée d’Unités avec différentes Qualités de Combat, le Chef apportera toujours des dés équivalents à la meilleure Qualité de Combat présente dans la Formation). Le joueur allié obtient 10 Dés de Combat Moyens pour ses10 Unités de cavalerie, plus 2 grâce à la Valeur Tactique de Mourad Bey, pour un total de 12 Dés de Combat Moyens.
Le joueur allié lance donc ses dés en premier grâce à l’Événement de Réaction Feinte et obtient 5 touches, ce qui n’est pas mal si l’on considère qu’il n’y a que deux faces de perte sur un Dé de Combat Moyen. Normalement, cela n’aurait pas d’impact sur le jet du joueur français, mais à cause de la Feinte, il est obligé de retirer ces pertes immédiatement. Cinq précieux Réguliers français sont donc éliminés, et cinq pions Grognards sont placés dans un espace du plateau appelé l’Hôpital Militaire.
Comme nous le verrons dans un prochain article, ces anciens Réguliers pourront revenir en tant qu’Unités de Grognards lorsque l’Expédition Scientifique Française aura fait suffisamment de progrès pour organiser un service de santé performant sur le terrain (oui, Dominique Larrey le chirurgien en chef de la future Grande Armée est déjà là !).
Ayant subi ces 5 pertes, le joueur français ne lancera que 10 Dés de Combat Élite au lieu des 15 initialement prévus. Néanmoins, grâce à l’Événement de Réaction de sa Carte Nation qui lui permet de bénéficier du résultat Carré d’Infanterie, chacun de ses dés a 2 chances sur 3 d’infliger une perte.
Eh bien, nous avions anticipé du grabuge et nous n’avons pas été déçus ! Le joueur français répond en infligeant six pertes. Après avoir éliminé six de ses Unités, le joueur allié doit battre en retraite puisqu’il a subi le plus de pertes. Mourad Bey pourrait se retirer derrière les fortifications du Caire avec ses quatre unités restantes mais cela scellerait probablement son destin car ses chances de survivre à des assauts répétés de la ville sont très faibles. Au lieu de cela, le joueur allié choisit de laisser une unité au Caire pour défendre la ville (qui est maintenant considérée comme assiégée) et Mourad Bey se retire au sud vers Meniet avec les trois autres unités. Il s’est déjà passé beaucoup de choses et les Français viennent juste de débarquer et de s’enfoncer dans le pays. Nous verrons plus en détail dans un prochain article comment Mourad Bey peut s’opposer à cette nette avancée des soldats de la révolution.
Article par Marco Poutré et Pascal Toupy.