Série plutôt bac à sable, Europa Universalis n’est pas connue pour l’excellence de son volet militaire, qui fait office de parent pauvre : le nombre d’unités est très limité, les rebelles gérés de manière peu réaliste, il faut souvent poursuivre un ennemi en fuite dans un jeu de chat et de la souris épuisant… Aussi est-ce avec grand intérêt que la parution de cette nouvelle extension au titre prometteur, The Art of War, est accueillie. Comme toujours depuis un certain temps, un patch gratuit l’accompagne. Voyons de quoi il retourne.

 

Nouveautés militaires et diplomatiques

Après un temps d’améliorations plus portées sur les colonies, les régimes politiques ou le commerce, la présente extension nous gratifie d’ajouts militaires et diplomatiques dont certains sont franchement bien pensés. Ils permettent de  redonner un intérêt à plusieurs périodes, comme la guerre de Trente Ans, qui ravagea l’Europe de 1618 à 1648, ou la fin du jeu, couvrant la Révolution et l’Empire. C’est-à-dire qu’il y a foule de nouvelles mécaniques et évènements d’ambiance qui rendent ces périodes plus « charnues » et dotées de contenus bienvenus.

Il est par exemple possible de créer des Etats-clients loyaux sur la carte, à partir de provinces conquises. C’est à dire que l’on dote ces vassaux d’une capitale, de provinces et même d’un nom. Cela rappelle évidemment la politique de Napoléon avec les créations de pays à sa botte comme le Royaume de Westphalie, dirigé par l’un de ses frères. Cette feature apparaît avec le niveau 22 de technologie diplomatique, soit vers 1700 pour les pays européens. Quant aux vassaux traditionnels, on peut désormais les transformer en marches, soit en états-tampons face à vos ennemis. Aux franges de vos possessions, ils rapporteront moins mais auront de meilleures défenses. Une stratégie qui peut s’avérer payante et complète les interactions dans sa zone d’influence.

D’ailleurs les relations avec ces pays et vos alliés ont été repensées. Pour améliorer la coordination lors des guerres on peut donc désormais leur assigner des objectifs, des comportements à adopter (défensif, offensif…), transférer des provinces que vous occupez sous leur contrôle etc. Cela permet un contrôle accru qui n’est pas malvenu. Finis ces alliés qui agissent dans leur coin. On notera aussi la possibilité de se battre pour leurs casus bellis et d’abandonner des revendications sur des provinces qui ne nous intéressent pas, pratique pour améliorer ses relations avec un pays-cible, d’autant plus que les options diplomatiques et de paix sont plus riches qu’avant.

Un travail certain a aussi été réalisé sur les armées, bien plus faciles à produire qu’avant, avec moins de micro-gestion. Quant à la marine, elle a subi un lifting de taille. J’entends par là qu’un vaste problème n’existe plus : que faire des vieux navires ? Comme vous le savez, la technologie ne les améliorait pas et l’on était souvent réduit à les envoyer au charbon ou les retirer du jeu. Là, il est maintenant possible de payer, plutôt cher, pour les faire passer au niveau supérieur (ce qui prend, au port, un certain temps). Je salue cela, qui règle un souci majeur et qui est historique : de nombreux navires ont subi des refontes coûteuses au cours de l’Histoire. Je trouve néanmoins dommage qu’il soit possible de le faire dans n’importe quel port (un navire de ligne a besoin de plus d’infrastructures qu’une flûte de transport !) et durant tout le jeu… Certes, plusieurs navires ont eu une très longue carrière… Mais imaginons dans le jeu une caravelle devenue un grand navire de 120 canons 200 ans plus tard… Impensable dans la réalité.

A côté de cela, on peut placer ses flottes en réserve (elles n’ont plus de valeur militaire mais coûtent beaucoup moins cher à entretenir), leur donner pour mission automatique de transporter des unités (autre gestion laborieuse qui s’améliore) ou encore vendre des navires en surplus. On le voit, les améliorations sont essentiellement maritimes et concernent hélas peu le reste… Lesdits  « régiments » du jeu, comprenant 1000 hommes chacun, n’ont rien d’historique et les unités sont en nombre ridiculement faible. Impossible également de les structurer autre qu’en piles et toujours pas de trace de chaîne de commandement. Le jeu n’est certes pas un Hearts of Iron, mais cela reste bien pauvre… Quant aux noms de généraux, ils ne correspondent pas toujours bien à la réalité. Ce dernier point est certes un détail, mais tout un travail reste à faire.

Apports du patch 1.8

La liste des changements se retrouve de ce coté chez Paradox, voyons ici les principaux. Le premier ajout de taille est donc la refonte totale du système de rebelles, et l’ajout d’une nouvelle donnée appelée « autonomie ». Je n’hésiterais pas à dire que ce volet est de grande importance et qu’il améliore grandement la gestion des révoltes, jusque-là assez illogique et aléatoire. Ainsi, si les provinces gardent une valeur d’agitation (auparavant « risque de révolte »), les possibles révoltes passent dorénavant par un autre écran : elles ne sont plus spontanées et il est possible de mieux suivre l’évolution des factions rebelles, leur force et leur capacité à passer à l’action, donc les contrer. Le joueur a donc un meilleur contrôle sur la chose, bien qu’il lui faille désormais composer avec l’autonomie des provinces. A une époque où les états tentaient d’intégrer peu à peu les régions conquises à leur ensemble, ou voulaient centraliser le pays, le fait que chaque province soit maintenant plus ou moins autonome par rapport au centre est réaliste et bienvenu. En gros, plus une province est autonome et moins elle rapporte au joueur, bien qu’il puisse vouloir lui donner plus d’autonomie pour réduire l’agitation locale.

Avec le temps et les technologies la valeur décroît doucement, même si elle ne peut pas descendre au-dessous d’un certain seuil pour les colonies, ce qui est là encore plausible. Les conquêtes en seront d’autant plus ralenties. Rajoutez à ce système une gestion des cardinaux et des réformes plus détaillés, une carte retravaillée (avec de nouveaux états notamment), et vous obtenez des améliorations gratuites réellement dignes d’intérêt.

Pour conclure, je me trouve finalement un peu dans la même situation que pour les extensions précédentes : les ajouts sont sympathiques, plutôt nombreux et continuent indéniablement d’améliorer le jeu. Un passionné de la série aura du mal à s’en priver et à se « contenter » du patch. Toutefois, malgré son nom, la gestion pure de la guerre et notamment des combats reste succincte, grosso modo cela reste une pile d’unité contre une autre en espérant que « ça passe », et la note de 20 euros pour s’acquitter des droits d’achat est franchement salée. Vous voilà prévenus.

 

 

EU 4 - The art of war
Les pays mineurs ont désormais des évènements plus ciblés, ajout sympathique. Sous ma férule, l’Éthiopie se centralise.
EU 4 - The art of war
L’autonomie d’une province. A noter que le découpage de la carte compte désormais 900 nouvelles provinces.
EU 4 - The art of war
Nouvelle capacité: abandonner un groupe d’idées.
EU 4 - The art of war
Mettre une flotte en réserve peut permettre d’économiser.
EU 4 - The art of war
La nouvelle amélioration des navires.
EU 4 - The art of war
On peut dorénavant orienter ses alliés et sujets durant les guerres.
EU 4 - The art of war
La mise à niveau est longue et chère.
EU 4 - The art of war
Encore quelques approximations… Soult s’appelait Jean de Dieu et Nicolas fut un surnom dont on l’affubla pour des raisons qui dépassent le cadre de cet article.

Points positifs et négatifs

  • La gestion de la marine.
  • Le nouveau système de rebelles et d’autonomie provinciale.
  • Plus d’options diplomatiques et plutôt bien pensées.
  • Finalement peu d’ajouts purement militaires.
  • Toujours trop cher.

 

12 Commentaires

  1. La remarque ultime concernant le prix de vente de cette extension reste pour moi l’écueil majeur, surtout en tenant compte des lacunes persistantes du module militaire. L’attente d’éventuels DLC à venir assujettis à une probable édition « Complete », comme ce fut le cas pour E.U.3 m’apparaît désormais comme indispensable. Cela devient vraiment une sale habitude, bien pénible, que de se sentir contraint à espérer ce type d’édition, par le jeu irritant des DLC qui entretiennent, à raison, la sensation de ne pas acheter un jeu véritablement terminé ou du moins, suffisamment abouti :/

    • Tu as tout à fait raison. La sensation de « jeu en kit » est indéniable et, comme je l’ai dit, s’il y a du bon, les choses ne sont pas poussées à leur maximum à chaque fois.

  2. J avais precommande EUIV- sombre erreur de ma part ! Je n y ai quasiment pas joue et il ne m interesse plus. Le pigeon a pris son envol et ne reviendra plus

    • Je vois que mon commentaire peut prêter à confusion aussi je veux préciser ma position. Comme le dit Davout, c’est l’aspect « jeu en kit » ou encore le syndrome de la vache à lait qui me pose problème, pas le jeu en lui-même, que je trouve plutôt bon même s’il ne me satisfait pas entièrement. Je tiens surtout à mettre en garde les nouveaux venus dans la série, pas à les dégoûter :) Par rapport à ce que dit Vadim84, je peux comprendre une telle frustration et je déplore qu’elle puisse être principalement liée à la politique commerciale de Paradox (mais peut-être ais-je mal interprété ?), plus qu’à la qualité intrinsèque de leurs jeux. Si ce genre de commentaire pouvait susciter une prise de conscience de leur part, ce serait un point très positif ; on peut toujours rêver ! ;)

      • Pour le jeu je serai bien en peine de le (re)juger : je n y touche plus. Le cote « kit » est tres desagreable mais j etais en qq sorte prevenu. J ai fais l erreur de la pre-commande…du coup j ai teste un moteur de jeu plutot sympa mais avec les 3/4 des cultures vides en style « a votre bon coeur m’ssieurs les modeurs ». Alors comme la communaute est nombreuse, les reactions ne se sont pas faits attendre, apres pour un joueur occasionnel devoir recommencer sa partie toutes les 3 sem c est frustrant. A force de devoir attendre une version finie de tel ou tel mode j ai mis le jeu de cote, peut etre je le reprendrais quand on en sera a EU5 .Qu un jeu en version 1.00 ne soit pas totalement abouti est bien normal, ce qui me chagrine c est que j ai l impression que maintenant que Paradox a grandi les produits « finis » sont de moindre qualite que ce qu on a eu sur HOI2 (grand jeu pour moi) par exemple. C est un peu un comble…

        • Oui, le débat pourrait certainement durer, sur l’évolution supposée de la production Paradox. En ce qui me concerne je ressens un peu la même chose que toi, à savoir que E.U.2 reste mon préféré de la série. C’est d’ailleurs avec lui que je l’ai découverte, étant totalement passé à côté du premier. Le trois m’a occupé pendant pas mal d’heures mais j’ai toujours déploré la suppression du mode de jeu Fantasia (ce qui, j’en suis conscient, n’est pas le cas d’une majorité de fans). Le côté Benny Hill des batailles et autres soucis liés aux révoltes, ainsi que le système de colonisation plutôt caricatural ont fini par m’en lasser. Ce quatrième volet m’a tout d’abord séduit par son accessibilité et ses qualités graphiques mais, comme beaucoup, l’aspect kit m’a dissuadé d’y jouer plus qu’une poignée d’heures (à peine plus d’une vingtaine, d’après STEAM et si j’ai bonne mémoire). Trop d’évolutions encore en attente d’implémentation font que je patienterai encore quelques mois avant d’y remettre le nez. Bien évidemment, je m’attends à voir publié E.U.5 d’ici là, ce qui remettra encore en question l’intérêt de celui-ci… :)

          • Personnellement j’en suis à plus de 110 heures sur ce quatrième volet que j’ai beaucoup apprécié. Mais il est certain que sans les multiples extensions il est bien moins plaisant qu’actuellement… A re-tester en version « gold » en fin de vie du jeu pour ceux qui veulent en profiter à prix correct.

  3. tiens, j’y pense…
    Et parmi les améliorations, y’a-t-il la disparition de ces fameuses courses-poursuites qui advenaient soit dans les révoltes soit après une bataille perdue…?
    EU IV m’a donné de l’urticaire à cause de l’IA qui ignore le brouillard de guerre (ou alors je n’ai pas trouvé l’option). Si elle repère une armée en formation par exemple à trois provinces du lieu où elle mène un siège, elle laisse tomber le siège pour ratatiner l’armée en formation et la poursuivre jusqu’à destruction complète même si c’est à l’autre bout de votre Etat. et après elle reprend le siège. J »ai vécu l’expérience d’une armée défaite en Alsace et détruite finalement en Béarn
    Et comment sont gérés les renforts maintenant ?

    • Il y a moins de courses-poursuites, mais ce problème est encore présent. Les renforts n’ont pas subi de modification énorme que je sache… Des doctrines et conseillers permettent de les améliorer.

  4. En parlant du prix, je regardais par curiosité à combien monte l’ensemble du jeu plus extensions et mini DLC (unit packs, portraits, songs, etc.). Pour EU IV on en est à 117 euros et pour CK II cela atteint les 175 euros. Heureusement qu’il y a souvent des promos …

    • Je savais qu’on dépassait les cent euros mais l’info demeure intéressante et donne à réfléchir. En tous cas voila encore une raison de promouvoir les créateurs indépendants mettant à disposition gratuitement leur production. Je profite -éhontément- de l’occasion pour parler d’un projet très ambitieux mené par un gars solitaire, que je suis depuis quelques années déjà. Ça s’appelle Ultima Ratio Regum (http://tiny.cc/kpqspx), c’est rébarbatif visuellement mais comme des jeux tels que Dwarf fortress, l’intérêt est ailleurs. Ce projet progresse très lentement (et pour cause) mais je reste persuadé qu’il sera mené à son terme. J’espère sans trop y croire qu’un studio ou autre mécène pourra lui offrir les moyens d’étoffer graphiquement son travail, tant il suffit de constater combien ce type est passionné, compétent et inventif, pour comprendre qu’il fait partie de ces gens qui portent à bout de bras l’avenir des jeux vidéo. Aussi longtemps que des types comme ce Mark R Johnson auront le désir de donner substance à leurs rêves (la formule n’est pas la mienne), le jeu PC aura un avenir :)

    • La comparaison avec CKII est interessante. Autant dans le premier cas,j ai l impression que l editeur n avait absolument pas anticipe le succes du jeu et s etait donne plus de mal avant la sortie, autant dans le cas d Europa la machine est plus que rodee et l editeur est tombe dans la facilite, sachant tres bien que bcp allaient remettre la main au portefeuille 3 mois apres juste pour beneficier d un bon systeme de colonisation. Je ne dis pas que Paradox est peuple d etres vicieux manipulateurs ou quoi que ce soit, juste que la version de base d Europa IV etait franchement mauvaise. J avais fais le ronchon-decidement ce jeu ne me reussi pas- sur le systeme a point mais finalement c est un mechanisme interessant, juste que  » l univers »,ce qui fait le sel de ces jeux sandbox, etait tres pauvre meme compare a un Crusader II de base. Les extensions de Crusaders jouent plus un role « de vraies extensions » tandis qu avec Europa, il s agissait deja de donner chaire a un moteur de jeu qu on nous aurait refile lors de la prevente. C est devenu une grosse franchise,le succes etait assure avant meme la sortie, un peu plus d attention n aurait cependant pas tue la poule-au contraire !
      Pour moi c est le 3 (av mod) qui fut une vraie joie ludique, sauf que j y ai eu acces qu une fois qu il avait pris 2-3 extansions et bien maturise. La,bon bah je vais attendre encore 2-3 ans avant de retoucher a un jeu que j ai acquis en prevente, c est assez Paradox(ale) comme situation,non?

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