Cinquième extension majeure du désormais conséquent Europa Universalis IV, Common Sense apporte une fois de plus son lot de nouveautés. Le moins qu’on puisse dire est qu’elles sont nombreuses et qu’elles entendent refondre des pans entiers du jeu, comme la gestion des provinces. Par ailleurs, le tout parvient à rendre toujours plus attractif certains pays comme le Royaume-Uni, dont le fameux parlement est modélisé. De plus, schéma bien connu, l’extension s’accompagne d’ajouts gratuits via un patch. Passons donc à une revue de détail de tout ceci !
Les provinces : le cœur du jeu
Ce n’est un secret pour personne, les joueurs de la série passent beaucoup de temps sur leurs provinces, notamment en les améliorant par le biais de constructions diverses, dont certaines sont uniques (fort frontalier…). Or, la présente extension a pris le pari de totalement revoir cet aspect du jeu. Désormais, on ne pourra plus construire n’importe quoi n’importe où : les bâtiments disponibles dépendront du type de terrain de la province et du niveau de développement de celle-ci. Autrement dit, une province pauvre en début de partie, et située dans un terrain peu facile d’accès comme la montagne ne pourra être le lieu où construire de nombreux édifices. Heureusement, en dépensant des points de monarque, ledit niveau de développement des provinces pourra être amélioré, ce qui va leur donner également d’autres bonus (fournissent plus de soldats, rapportent plus etc.).
Néanmoins, il faudra passer par un long travail de sélection parfois cornélien : que construire et où ? Dois-je dépenser des points de monarque déjà très sollicités (technologie, stabilité, généraux, événements, accords de paix…) pour améliorer mes provinces ? Ou les garder pour autre chose, au risque de prendre du retard économique ?
Cela oblige à revoir sa façon de jouer, même si amène un certain déterminisme : les endroits déjà pauvres en début de partie tendent à le rester, vu qu’on développera fatalement ceux qui vont rapporter le plus avec les bâtiments qu’on y construira ! On notera d’ailleurs qu’ils coûtent désormais plus cher (ajout gratuit cette fois) mais offrent, en contrepartie, de meilleures améliorations qu’avant. Finalement, cela amène à toujours plus de personnalisation des pays et implique davantage le joueur dans la gestion de son état.
État, Église et parlement
Depuis un certain temps la série modélise d’importantes « instances » internationales de l’époque : la papauté et le Saint Empire Romain Germanique, dont le chef, un empereur, a un certain pouvoir en termes de jeu. Leur gestion s’est peu à peu affinée et améliorée et continue de prendre ce chemin avec Common Sense. L’empereur a par exemple de nouveaux pouvoirs comme déclarer un pays à une seule province « ville libre d’Empire », ce qui lui octroie des bonus, et la possibilité d’en appeler à ce souverain pour l’aider contre des visées voisines. Cela rappelle bien la réalité : l’Allemagne comptait encore de nombreuses cités-états et le jeu rend assez bien son morcellement d’avant l’unification.
On notera aussi un effort fait sur la religion : les catholiques doivent gérer les sièges d’évêchés s’ils veulent espérer se faire écouter du souverain pontife, les protestants, qui ne reconnaissent pas son autorité, ont une nouvelle valeur à la place, qui permet d’orienter leurs pratiques religieuses, avec des conséquences en termes de jeu bien sûr. Terminons avec la dévotion des théocraties, valeur assez similaire à la légitimité des monarchies et qui affecte notamment la stabilité et les rentrées d’argent… Et le karma approchant des bouddhistes, qui a des répercussions sur la diplomatie ou la discipline des armées, suivant les actions des souverains de cette religion.
Enfin, les monarchies constitutionnelles et certains autres régimes doivent composer avec des parlements, soit des contre-pouvoirs à celui du roi. Ils sont représentés en jeu par des sièges, des grandes orientations de la politique de l’état et des votes autour de celles-ci. Le joueur les leur présente, et espère qu’elles seront votées, au besoin en corrompant les parlementaires. On pense bien sûr au parlement britannique et son importance pendant la période couverte par le jeu, et voir une telle donnée intégrée à la série est vraiment une belle avancée. On se souvient là de Charles Ier, qui affronta ledit parlement et y perdit la vie.
Notons d’ailleurs que les régimes ont désormais trois niveaux de développement dirons-nous, différent de leur type (monarchie administrative, féodale…), qu’on peut toujours choisir. Or, il est possible d’améliorer ces niveaux, via le prestige puis le développement général du pays. Y parvenir donne de beaux bonus et est un défi supplémentaire. C’est par exemple le fait de passer de royaume à empire.
Patch et pot-pourri
Le patch 1.12 (cf. ce long changelog par ici dans le forum officiel.) introduit selon moi des points très importants, comme le suivant : les provinces n’ont plus toutes automatiquement des garnisons. Désormais, seulement certaines entretiennent des forteresses, qui, outre prendre une case de bâtiment, coûtent cher à financer. C’est une très grande avancée de mon point de vue : à mesure que les frontières bougeaient, les dirigeants de l’époque couverte par le jeu cessaient d’entretenir des murailles internes, trop loin des menaces, gênant la croissance des villes… Et renforcèrent des points particuliers de leurs pays. Je pense bien sûr à la France de Louis XIV dont le célèbre Vauban arma les côtes, les Pyrénées et surtout le Nord-est.
Ce sera donc au joueur de choisir ce qu’il souhaite garder, mettre en réserve (coût moitié moindre) ou détruire en termes de forteresses. Les guerres gagnent en réalisme, car faire le siège de la plupart des provinces ne prend plus beaucoup de temps. Quand on pense aux officiers très manœuvriers comme Turenne ou bien sûr Napoléon, cela redonne un peu d’intérêt au mouvement.
De la même manière, annexer un état devient beaucoup plus dur et pointilleux : il faut sélectionner toutes les provinces adverses, et avoir un très important score lors d’une guerre mêlant plus de deux pays (voir capture d’écran pour mieux visualiser la chose)… En effet, annexer l’un d’entre eux est maintenant très coûteux à contrecarrer dans la balance des propositions de paix et, franchement, cela limite un peu artificiellement l’expansion très (trop ?) rapide que peut effectuer l’ordinateur certes, mais surtout un joueur humain. Ce dernier point ne m’a pas paru des plus pertinents.
Hélas, les ajouts sont trop nombreux pour être tous détaillés. Citons tout de même pêle-mêle de nouveaux événements, la possibilité de mettre en pause l’occidentalisation, de renvoyer un conseiller non engagé pour en faire apparaître un nouveau, l’ajout de succès et de religions (Zoroastrisme…) comme les corrections habituelles de bugs. Évidemment, la liste n’est pas exhaustive. La version française, elle, reste ce qu’elle est avec ses habituels bugs d’affichages et passages non traduits.
Pour conclure, je dirai qu’une fois de plus le contenu est conséquent, voire très conséquent cette fois et souvent bien pensé. Il renouvelle le plaisir des parties et affine sans cesse un jeu déjà profond. Je pense notamment aux parlements et à la nouvelle gestion des fortifications, plus réaliste. Pourtant je pense que le système de développement provincial et celui d’annexion vont diviser une partie des joueurs. Des choix ont été faits, mais ils ne plairont pas à tout le monde. Moi-même reste mitigé sur ces deux évolutions, tout en saluant l’effort accompli depuis le début du jeu… Jeu qui, répétons-le, revient fort cher si l’on achète toutes les extensions, hors des périodes de promotions heureusement assez fréquentes.
- Les parlements.
- Les forteresses.
- Une meilleure modélisation des religions.
- Les ajouts gratuits sont trop complémentaires de l’extension pour vraiment en profiter seuls.
- Peu convaincu par le nouveau système d’annexion.
Date de sortie : 9 juin 2015
Studio – Éditeur : Paradox Development Studio / Paradox Interactive
Site officiel : www.europauniversalis4.com ; fiche sur Steam ; fiche chez Paradox
Prix : 14,99 € (téléchargement)
A lire en complément nos articles : EU IV – El Dorado : l’or au bout des doigts, EU IV – Art of War, EU IV – Wealth of Nations : Sono mercanti !, EU IV – Conquest of Paradise : le Nouveau Monde aléatoire, Conquest of Paradise : jouer les peuples amérindiens, Conquest of Paradise : le nouveau système de gestion des colonies et Europa Universalis IV, la conquête du monde à portée de main.
A noter aussi en parallèle de cette extension la sortie du DLC Common Sense Content pack (soit 5 lot d’unités supplémentaires) et de EU IV : Common Sense E-Book.
ça me donne bien envie, merci pour le test maréchal !
Je précise pour refroidir certaines ardeurs éventuelles que si vous ne possédez pas le DLC testé ici, le nouveau système des provinces s’applique mais vous ne pouvez pas en modifier le développement ce qui fige complètement le jeu.
Si quelqu’un a un truc pour contourner l’obstacle, je suis preneur… (à part acheter le DLC)