Cela ne vous aura probablement pas échappé, le nouveau titre d’Ageod dédié à la Première Guerre mondiale est donc disponible depuis peu chez Matrix. Et dans la foulée il arrivera demain sur Steam. En attendant notre prochain test, pour éclairer un peu plus vos lanternes si vous n’êtes pas anglophile, voici la traduction d’un intéressant entretien paru sur The Wargamer il y a quelques jours.
Pour plus d’informations sur le jeu, voyez cette fiche. A noter qu’une offre de lancement, soit une ristourne de 5 dollars ou l’équivalent en euros, est valable pendant la semaine suivant cette sortie.
The Wargamer : Cela serait probablement bien si nous commencions par vous demander de nous parler de vous et des gens impliqués dans le développement de To End All Wars, et de la manière dont cela s’est passé.
Ageod : L’équipe de To End All Wars est constituée de 6 personnes. Dans le désordre il y a le producteur du jeu, Tamas Kiss, qui est en charge de la coordination et des questions-réponses. Après il y a les graphistes, Massimo DelBono, qui a travaillé sur les portraits et les unités, et Nicholas Eskubi, d’Espagne, qui a travaillé sur la carte et l’interface. Ben McJunkin est la personne qui travaillait initialement sur le projet, car il a commencé simplement comme une campagne sur l’année 1914 puis a évolué en un projet de plus grande ampleur. Finalement, Philippe Thibault est en charge de la supervision et de la correction des scénarios, et Philippe Malacher (Pocus) est en charge de la programmation et de la conception technique.
Je suppose qu’il est assez évident que le jeu a été développé pour sortir l’année du centenaire du début de la 1ère G.M., toutefois, n’est-ce pas jusqu’à présent un conflit qui a été négligé par les développeurs de jeux ? C’est difficilement un conflit sans conséquences, bien au contraire, mais pourquoi pensez-vous qu’il suscite si peu de couverture dans les jeux ?
En toute honnêteté il y a eu des jeux sur ce conflit, comme Commander The Great War de The Lordz (voir notre test). To End All Wars a néanmoins plus de profondeur, et est destiné à combler l’absence d’une simulation militaire précise de la Grande Guerre. Dans l’esprit des gens la Grande Guerre est la plupart du temps vue comme une empoignade ennuyante près de la frontière belge, mais c’est bien plus que ça. En faisant ce jeu nous voulions aussi rendre justice aux millions d’hommes ayant combattu en Russie, dans les Balkans, et dans des endroits loin de l’Europe et des USA, comme le Cameroun et la Chine.
Combien de temps cela a-t-il pris pour développer To End All Wars ? Cela a-t-il était plus long ou plus court que vous l’aviez prévu ?
Le développement de jeux est toujours plus long que prévu, même si vous planifiez en tablant sur un retard, et rajoutez encore un retard supplémentaire par-dessus. Plus sérieusement, cela a été un important travail pour l’équipe de parvenir au niveau de détails que nous voulions obtenir tout en réalisant efficacement les autres parties du jeu. En tout cela représente probablement une année pour six personnes.
Quels ont été les plus importants défis rencontrés durant le développement ? Et à l’inverse quelles furent les parties les plus faciles ?
Pour la programmation ce fut vraiment apprendre à l’IA ce qu’est un front et comment se comporter quand la densité des troupes atteint un tel niveau que vous n’avez plus qu’une seule option, accumuler de la puissance de feu et essayer de briser la position de l’ennemi à un endroit donné. La difficulté était aussi d’équilibrer plusieurs mécanismes de jeu afin qu’ils soient historiques, amusants et faciles à comprendre. Nous voulions par exemple un peu de recherche technologique, mais cela devait rester simple et ciblé, tout en étant quand même intéressant à gérer.
La série de jeux de Grande stratégie d’Ageod a été couronnée de succès, est-ce que To End All Wars introduit de nouveaux mécanismes ou fonctionnalités qui n’avaient pas encore été vues dans les précédent titres ?
Oui, il y a beaucoup de petits, voire pas si petits que ça, mécanismes supplémentaires. Nous avons parlé de la recherche, qui débouche sur l’utilisation des blindés, de troupes de choc, de gaz de combat et d’avions ou sous-marins évolués. Certaines fonctionnalités sont plus discrètes visuellement, mais tout aussi importante, comme le partage de réseaux de tranchées dans une même région. A l’arrière-plan, l’IA fait une utilisation plus intensive de nouvelles fonctionnalités, non-visuelle, qui l’améliore grandement.
Quelles caractéristiques de la 1ère G.M. aviez-vous plus particulièrement envie de modéliser, et pourquoi ? Quel défi cela a-t-il alors posé durant le développement ?
Tout le monde pense à la guerre des tranchées évidemment. Mais en fait la fonctionnalité était plus ou moins déjà présente dans notre moteur de jeu. En 1918 l’impasse sur le front Ouest change du fait de la mise en œuvre de nouvelles armes et tactiques. Cela a été particulièrement un défi de représenter les nouvelles tactiques d’infiltration allemandes et les troupes spécialement entrainées à cela (les troupes de choc). Nous ne voulions pas créer des sortes de über soldats, et de plus il était important que les pertes subies par ces unités spécialisées soit quasi irremplaçables, faisant que leurs offensives doivent être soigneusement planifiées et exécutées par les joueurs. Nous sommes parvenus à trouver une solution très inspirée combinant une unique troupe d’assaut avec une fonctionnalité spéciale d’infiltration et une décision spéciale en jeu intervenant quand ces unités sont présentes, le tout donnant des résultats similaires à ce qui s’est passé par exemple en mars 1918 (en cas de succès, le niveau des tranchées sera quasi réduit à néant, les défenseurs perdront beaucoup de cohésion, et les troupes de choc seront plus ou moins en sang tandis qu’elles ouvrent la voie à des troupes plus standard).
La 1ère G.M. fut vraiment un conflit global, néanmoins le front de l’Ouest capture l’essentiel de l’attention du fait des horribles niveaux de pertes humaines. Comment avez-vous équilibré le besoin de représenter cette échelle globale tout en conservant l’accent sur les zones les plus significatives ?
Et bien, même si il n’y a « A l’Ouest, rien de nouveau », ce n’est pas le cas ailleurs comme mentionné avant. En effet la plupart des gens ignore qu’il y a eu beaucoup d’action sur le front Est, dans les Balkans et au Moyen-orient. Ou aussi en Afrique. Le défi pour le joueur Allié est qu’il est divisé en deux factions, l’Entente coté Est et coté Ouest, ce qui les met dans une position difficile pour se coordonner et donne à celui jouant le russe une partie amusante (et parfois intense aussi). Mais cela représente assez bien le fait que certains membres de « l’alliance » pouvait souffrir différemment (et les allemands peuvent ainsi essayer une stratégie misant « tout contre la Russie »). La conquête des régions ou secteurs périphériques va de manière similaire rendre certains points de victoire difficiles à décrocher, ou amener des changements dans la volonté de se battre, aussi ces conquêtes ne sont pas toujours aussi inutiles ou vaniteuses qu’elles peuvent paraitre : après tout, le concept de l’opération des Dardanelles par Churchill était brillant, juste piètrement exécuté au point d’être devenu le fiasco que l’on connait.
Le développement de jeu implique inévitablement des compromis, quelles sont les fonctionnalités que vous vouliez inclure dans To End All Wars, mais qui n’ont pas pu être intégrées dans la version sortie ?
Nous voulions montrer plus dynamiquement les lignes de tranchées et les explosions d’obus ou les attaques au gaz, mais le travail nécessaire pour le rendu était au delà de nos possibilités si nous voulions sortir le jeu pour le centième anniversaire de la guerre.
En tant que développeur, quelles sont vos unités favorites dans le jeu, et lesquelles pensez-vous que les joueurs apprécieront d’utiliser le plus ?
J’aime les Stosstruppen allemands (cf. les troupes de choc ci-dessus), mais aussi les navires et les avions, de toutes les nations. En fait la guerre aérienne et navale a reçu une attention particulière, et ainsi les unités utilisées sont devenus familières, un peu comme des animaux de compagnie. Je pense que les joueurs aimeront les généraux à cause de leur individualité – portraits, caractéristiques, tels Laurence d’Arabie, Von Lettow Vorbeck ou même la superbe Mata Hari – mais les joueurs aimeront aussi probablement les unités spéciales car ils seront ravis de préparer leur grandes offensives avec des blindés ou des troupes de choc, soutenues par des chasseurs triplans et des bombardiers biplans. Ou alors ils se réjouiront d’envoyer quelques Zeppelins au-dessus de Londres pour bombarder les britanniques (la première Blitz aurait pu être en 1917 et non en 1940 …)
Enfin les joueurs se demandent toujours quel futur peut réserver un jeu, y a-t-il des idées pour l’avenir, des ajouts prévus pour To End All Wars par exemple ?
Nous ne nous sommes pas complétement décidés sur notre prochain projet. Nous pourrions revisiter un précédent classique, ou au contraire nous plonger dans un sujet complètement nouveau, c’est en train d’être débattu. Ce qui est quasi certain est que cela se déroulera à l’époque des fusils et des mousquets, ce qui est une information exclusive pour les lecteurs de Wargamer.com
L’article original, (Oh What A Lovely War to) End All Wars, se consulte directement sur cette page chez The Wargamer.